Le livre noir des cantines scolaires

Le livre noir des cantines scolaires : alerte dans l’assiette

Que contiennent les assiettes de nos enfants ? Si nous avons accès aux menus de nos chères têtes blondes, nous ignorons tout de la nature de ces produits. Où sont-ils préparés ? Comment sont-ils conditionnés ? Et que fait-on de la qualité nutritionnelle de l’assiette ? Sandra Franrenet a mené l’enquête dans Le livre noir des cantines scolaires et offre un décryptage magistral de leur fonctionnement.

D’abord, qui contrôle la cantine scolaire ?

L’époque où nos chères cantinières préparaient elles-mêmes le déjeuner des enfants est révolu. Si certaines collectivités se rebellent afin de reprendre en main la gestion de la restauration collective, elles sont en grande minorité. La majorité des cantines scolaires font aujourd’hui appel à une société de restauration collective (SRC). Gain de temps, gain d’argent espéré et risques sanitaires amoindris semblent convaincre les collectivités. Mais une fois le cahier des charges et le contrat signés, la SRC prend le contrôle de l’assiette au détriment de la qualité nutritionnelle du déjeuner des enfants. Rappelons que ces SRC sont des sociétés privées dont le dessein est la maximisation du profit pour assurer leur pérennité. Nul ne peut les blâmer, toute entreprise doit maximiser son profit pour assurer sa survie. Sauf qu’ici, c’est le déjeuner de nos enfants qui est en jeu. Et c’est là le problème.

DIETIS Une marque de ALANTAYA SAS
Inscrivez-vous à notre newsletter

Quoi de bon au menu ?

En regardant succinctement le menu des plus petits, on se rassure. On y trouve des sources variées de protéines, nombre de fruits et de légumes, des produits laitiers. Sur le papier, tout semble réuni pour une alimentation équilibrée. Sur le papier seulement.

Des aliments ultra transformés

Pour un gain de temps et d’argent optimal, quoi de mieux que les aliments ultra transformés (AUT) ? La réponse de Marie-Line Huc, diététicienne-nutritionniste conseil, est sans appel « ils reviennent moins cher que les plats maison réalisés avec des produits bruts ». De plus, les produits transformés permettent une meilleure gestion des quantités. L’auteur utilise l’exemple d’un bœuf bourguignon. Si la collectivité commande un bœuf bourguignon préparé et reconditionné, elle aura la possibilité de commander la juste quantité selon le nombre d’élèvesA contrario, si le cuisinier devait cuisiner (vous nous excuserez du pléonasme), la quantité et le mode de cuisson auraient un impact sur le rendement final. Une organisation plus complexe et du temps perdu donc. Et le temps, c’est de l’argent.


Une stratégie gagnant-gagnant pour les SRC et les collectivités dont les dépenses diminuent considérablement. Mais cela empiète sur le contenu de l’assiette. Sandra Franrenet a mené l’enquête dans la cuisine centrale de son arrondissement de Paris où les allumettes fumées végétales bio surgelées, les portions de colin d’Alaska meunière et les cocktails de fruits au sirop sont au menu, accompagnés d’épaississants, de colorants et autres réjouissances. Les allumettes fumées végétales et le colin d’Alaska comprennent d’ailleurs plus de 15 ingrédients, dont certains ne sont guère rassurants. D’ailleurs, si vous trouvez sur des étiquettes des termes tels que « huiles hydrogénées », « maltodextrine », « sirop de glucose », « protéines hydrolysées », « isolats de protéines de soja », vous avez entre les mains un AUT.

Tout savoir (pour les éviter !) sur les aliments ultra-transformés (AUT)

Des protéines animales à toutes les sauces

Il y a quinze ans déjà, l’ONU et la FAO reconnaissaient dans leur rapport qu’ « une alimentation comportant davantage de denrées alimentaires raffinées, d’aliments d’origine animale et de graisses joue un rôle majeur dans l’épidémie actuelle d’obésité, de diabète et de maladies cardiovasculaires ». Or, à la cantine, les enfants mangent très largement de quoi favoriser ces pathologies. Peut-être avez-vous déjà remarqué que les plats sont très souvent accompagnés de sauces ?

La liaison froide, lorsque la cantine réchauffe un plat déjà cuisiné, cuit puis refroidi, nécessite des plats en sauce afin qu’ils ne se dessèchent pas trop une fois réchauffés. Imaginez un steak cuit puis refroidi 2 jours avant l’arrivée à la cantine, qu’il faudrait ensuite de nouveau réchauffer avant de le servir aux enfants. Ce steak serait bien trop sec pour faire l’unanimité. Alors, en amont, des sauces sont ajoutées. La solution miracle pour éviter que les viandes ne se dessèchent ou pour camoufler la mauvaise qualité des aliments.

Doit-on continuer à manger de la viande ?

Salé-sucré

Les sauces sont élaborées à partir de… fonds de sauce. Mais, quel est le problème ? Quand on entend fonds de sauce en restauration collective, on est très loin des fonds de sauce de grand-mère qui mijotaient des heures durant, on se rapproche plutôt des fonds de sauce industriels. L’ingrédient principal ? Les sucres, des dérivés du sucre pour être exact. Ils sont multiples et répondent à plus d’une cinquantaine de noms. Sirop glucose-fructose, sirop de maïs, sucanat, nectar d’agave, amidon modifié, dextrine, maltodextrine et extrait de malt d’orge sont autant de noms des dérivés du sucre. Le sucre étant un merveilleux exhausteur de goût, force est de constater son intérêt dans les fonds de sauce. Ainsi, lorsque les enfants mangent une viande en sauce, le gras, le sel et le sucre sont tous trois réunis.

Difficile de rester serein face au contenu de l’assiette des plus petits. Les AUT et les sucres n’étant que la partie immergée de l’iceberg, nous ne saurions que vous recommander la lecture du Livre noir des cantines scolaires. Car il est fondamental d’être informé avant d’envisager de bouleverser les assiettes. Et c’est clairement nécessaire.

 

Sandra Frangent, Le livre noir des cantines scolaires, Leduc.s Editions, septembre 2018, 18 €. Disponible sur le site de l’éditeur.