C’est ce qu’avance un article paru dans le dernier numéro de la revue Science. L’immunothérapie, rappelons-le, est un traitement qui vise à « mobiliser » les défenses immunitaires du patient contre sa maladie.
Bactéries et immunothérapie
En 2015, une équipe de chercheurs française dirigée par la Pr Laurence Zitvogel (directrice du laboratoire Immunologie des tumeurs et immunothérapie contre le cancer à Gustave Roussy) ainsi qu’une équipe américaine montraient déjà le rôle important de deux bactéries dans le succès d’une immunothérapie contre un mélanome métastatique chez l’homme. « Lorsque ces deux bactéries sont absentes l’effet du médicament n’est plus perceptible. En permettant la colonisation de l’intestin par l’une ou l’autre des bactéries identifiées, l’efficacité du traitement est restaurée (…). L’analyse de la flore intestinale de patients souffrant d’un mélanome métastatique après traitement a permis de montrer l’importance de ces bactéries immunogènes dans la sensibilité au traitement et la diminution tumorale ». Cette équipe française concluait alors que le microbiote intestinal dictait la réponse thérapeutique.
Éviter les antibiotiques
En 2017, la même équipe, montrait l’impact d’une antibiothérapie chez 249 patients atteints d’un cancer du poumon non à petites cellules (CPNPC), d’un cancer du rein et de la vessie lors d’une immunothérapie. Lorsque ces patients prennent des antibiotiques 2 mois avant ou 1 mois après une immunothérapie, ils rechutent plus rapidement et survivent moins longtemps.
Les bactéries qui aident et les autres
En 2018, on observe que 35 % des patients atteints de mélanome et traités par immunothérapie répondent de façon positive, ce qui laisse 65% de patients non répondeurs. Des scientifiques se sont alors demandés si la composition du microbiote intestinal ne serait pas une des causes de cette majorité non réceptive.
Après examen des échantillons fécaux, ils observent une présence plus importante de Bifidobactérium longum, Collinsella aerofaciens, et Enterococcus facium chez les patients répondeurs. En parallèle une équipe de l’Institut Gustave Roussy est arrivée à la même conclusion avec la bactérie Muciniphila d’akkermansia et l’équipe du Centre de lutte contre le cancer de Houston, avec Faecalibacterium et Clostridiales. De plus, lorsqu’ils greffent des échantillons fécaux de patients répondeurs à des souris auxquelles ils implantent ensuite des cellules tumorales de mélanome, celles-ci présentent des tumeurs à croissance lente.
Des perspectives de recherche
« Nous devons commencer à tester les probiotiques comme moyen d’améliorer l’immunothérapie, ce que nous espérons faire en 2018 dans un essai clinique avec des bifidobactéries », indique le Dr Thomas Gajewski, professeur en immunothérapie du cancer à l’université de Chicago. Il faut ainsi préciser la liste des bactéries bénéfiques et non-bénéfiques, identifier les mécanismes d’influence du microbiote sur la réponse immunitaire au cancer mais aussi à prévoir de façon plus fine quels sont les patients susceptibles de répondre aux immunothérapies.
Et le Dr. Gajewski de conclure « le domaine a récemment reconnu des liens étroits entre le microbiome intestinal et le système immunitaire. Cette découverte fournit un moyen novateur d’exploiter cette connexion, d’améliorer l’immunothérapie en modulant sélectivement les bactéries intestinales ».
Sources
– Science :
• « The commensal microbiome is associated with anti–PD-1 efficacy in metastatic melanoma patients« , 5 janvier 2018, vol. 359 (6371), p. 104-108.
• « Commensal Bifidobacterium promotes antitumor immunity and facilitates anti–PD-L1 efficacy« , 27 novembre 2015, vol. 350 (6264), p. 1084-1089.
• « Gut microbiome influences efficacy of PD-1-based immunotherapy against epithelial tumors« , 5 janvier 2018, vol. 359 (6371), p. 97-103.
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