Qui n’a pas un jour éprouvé le plaisir de faire pipi dans l’eau ? Et vous vous imaginiez que ce n’était pas grave, un plaisir sans conséquences… Et si on vous apprenait qu’au contraire, le produit de nos défécations n’a rien d’inoffensif pour la nature, vous continueriez ? La première réaction qui nous vient alors à l’esprit : arrêtons de faire pipi dans l’eau ! LQDP vous explique.
Du petit pipi innocent à la pollution de l’environnement…
Saviez-vous qu’en 2009, des scientifiques remarquaient que le nombre de poissons d’eau douce féminins était en nette augmentation à cause des œstrogènes ? Petite explication : les œstrogènes sont des hormones qui se trouvent dans la pilule et que l’on retrouve donc dans les urines des femmes qui la prennent. Cette urine se retrouve dans les eaux usées, traitées dans les stations d’épuration. Si ces stations parviennent à traiter ces eaux, elles ne peuvent en extraire les hormones qui s’y trouvent. En déversant ensuite les eaux traitées avec les hormones, les poissons sont ainsi contaminés.
Il en va de même pour l’antibiorésistance. Quel rapport ?
Lorsque vous prenez un antibiotique vous encouragez les bactéries à en créer d’autres qui sont antibiorésistantes, et que nous retrouvons en grande quantité dans le microbiote. Vous savez bien que le microbiote c’est notre caca ! Et où le retrouve-t-on après notre passage aux toilettes ? Dans les eaux usées qui vont-elles-mêmes dans les stations d’épuration. Les eaux traitées sont ensuite déversées dans la nature. C’est ainsi que dans la revue Nature Communication, le 8 janvier 2019, des scientifiques ont montré qu’à la sortie des stations d’épuration « la quantité des bactéries antiobiorésistantes est étroitement corrélée à la présence du crAssphage , un bactériophage uniquement présent dans les excréments d’origine humaine et qui ne semble pas se développer hors des intestins. » Ces bactéries sont donc produites par l’homme.
Mais ce n’est pas tout !
Si 70 % des gènes de résistance sont détruits dans la station d’épuration, on en retrouve 30 % dans les eaux traitées. Ce phénomène s’expliquerait de deux façons. Tout d’abord, les conditions de vie dans les stations d’épuration. Il existe une corrélation entre la fréquence de l’antibiorésistance et la concentration de certains antibiotiques.
Mais aussi la promiscuité entre les micro-organismes. Les chercheurs ont vérifié s’il pouvait exister un échange de matériel génétique entre bactéries. Ce que l’on prouve par la présence de gènes marqueurs. Résutat : « ces gènes marqueurs se trouvaient souvent à proximité immédiate de gènes de résistance et leur présence indique donc que des échanges conséquents de gènes de résistance s’effectuent entre les germes pathogènes venant des êtres humains et les autres bactéries. »
Bon, d’accord mais quelles sont les conséquences de tout ça ? D’après les chercheurs, le scénario est en cascades. « Si des gènes de résistance sont transmis aux bactéries des boues activées et si ces dernières se disséminent dans l’environnement, elles y ont probablement de meilleures chances de survie que les germes pathogènes.». Ces bactéries sont ingérées par des êtres vivants qui ensuite seront ingérées par l’homme et qui ainsi développera une antibiorésistance. Et c’est pourquoi l’Organisation mondiale de la santé déclare : « Nous risquons aujourd’hui une ère postantibiotique dans laquelle des infections courantes et de petites blessures seront à nouveau mortelles. »
La seule solution pour éviter tout cela est de revoir le fonctionnement des stations d’épuration. Les Suisses sont en bonne voie. « (…) le meilleur moyen de l’éviter est d’extraire totalement la biomasse de l’eau dans les STEP. Les nouvelles techniques progressivement mises en œuvre dans les stations d’épuration suisses pour éliminer les micropolluants y contribueront. »
Ah, la légendaire propreté suisse…
Sources
– Nature Communication,
– Futura Sciences,
– Futura Sciences,
– Conseil fédéral suisse,