Savoir, penser, rêver

Savoir, penser, rêver : les scientifiques ont la parole.

« Savoir, penser, rêver. Tout est là », écrivait Victor Hugo. Ce livre donne la liberté de parole à des scientifiques afin qu’ils nous dévoilent leur vision du monde. Et c’est ainsi que commence une certaine discussion entre un savant et le lecteur. Ce n’est pas un cours. Mais finalement une pensée délivrée qui nous révèle le côté attachant et finalement très proche de ces scientifiques. Et nous allons voir que ces scientifiques ont tous une motivation très proche de nos préoccupations quotidiennes. 

L’importance de l’Autre

Jean-Claude Ameisen, médecin et biologiste, spécialiste d’immunologie, notamment du phénomène de « mort cellulaire programmée » (ou apoptose), par exemple s’émerveille (mais en même temps s’angoisse) devant les possibles qu’offre la science « J’ai senti alors que j’apprendrai sans cesse mais ne saurai jamais ». Mais qui cherchera toujours à transmettre, « Parce qu’un maître est toujours un enfant devant la connaissance. Il ne cesse de chercher, d’apprendre, de découvrir de transmettre ».

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Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel de médecine pour la découverte du virus du Sida, marquée par l’obsession de comprendre mais aussi par l’urgence d’agir. Pour elle, aucune intuition dans la démarche scientifique, « la démarche scientifique est fondée sur le raisonnement » mais elle a senti que sa découverte avait changé sa vie mais aussi celle de milliers de personnes. Au-delà de toute découverte et de tout éloge, l’Autre est le plus important. « C’est en vivant avec les autres et pour les autres que je trouve de l’intérêt à ma propre vie. ». Hubert Reeves au contraire défend l’importance de l’intuition dans les découvertes scientifiques « Beaucoup de découvertes scientifiques sont aussi le fruit de l’intuition, laquelle à sa manière, est une forme atténuée du hasard. »

Mais cet autre est aussi la projection de soi. Ainsi, l’intelligence artificielle à qui nous donnons une apparence humaine, « on fabrique du même, qui est « autre » tout en étant soi ». C’est ce que nous fait remarquer François Ansermet. Ce psychanalyste et professeur de pédopsychiatrie, l’autre n’est-il donc pas son sujet de prédilection ? « En science comme dans la vie quotidienne, il nous faut supporter l’incertitude, le mystère et le doute : c’est ainsi qu’on s’ouvre aux contingences, à l’autre, aux rencontres ».


Les femmes et les enfants, d’abord

Ces scientifiques ont aussi conscience d’un monde où existe encore les problèmes d’inégalité entre hommes et femmes et où l’enfant comme avenir du monde doit être protégé. Car si les femmes sont tout aussi capables que les hommes de devenir des scientifiques, elles sont moins représentées.

Agnès Bénassy-Quéré, économiste française, membre du cercle des économistes. Elle a reçu le prix du meilleur jeune économiste de France en 2000. Pour elle, la parité a des effets pervers dont il faut prendre conscience « Elle offre de belles opportunités, mais laisse planer le doute sur la compétence. À un collègue me suppliant de venir participer à un jury car « il me faut une femme », je m’entends encore répondre « je crois que la femme de ménage du labo est disponible. » ». Pour Edith Heard, généticienne, professeure au Collège de France, la femme doit être soutenue dans son parcours mais aussi dans sa vie privée. « Aussi faut-il soutenir non seulement les femmes désireuses d’avancer dans leur carrière, mais aussi les hommes qui soutiennent les femmes dans la réalisation de cette juste ambition. »

Pour Jane Goodall, primatologue, éthologue et anthropologue britannique. Elle a consacré sa vie à l’étude des chimpanzés. Elle délivre un message plein d’espoir à tous les enfants : « Nous avons tous un rôle à jouer. Nos vies comptent et c’est un message que j’adresse aux nombreux enfants à qui on n’a jamais dit qu’ils étaient importants. » 

Enfin Cécile Michel, l’assyriologue, insiste sur l’importance de l’éducation afin d’éviter l’obscurantisme : « L’éducation est fondamentale pour lutter contre l’obscurantisme. Un des grands principes de Daesh est de faire table rase du passé. Si les jeunes qui ont rejoint Daesh avaient connu la civilisation mésopotanienne (…) peut-être ne se seraient-ils pas engagés. ».

Sérendipité

Peut-on faire confiance au hasard quand il s’agit de découvertes scientifiques ? Comment trouver une solution que l’on sent proche mais qui nous échappe ? La sérendipité ! Beaucoup la souhaitent mais certains ne veulent pas s’en remettre complètement à elle. Selon l’Académie française ce terme, signifie « don de faire par hasard des découvertes fructueuses ». Aujourd’hui ce mot s’emploie fréquemment dans le monde scientifique pour désigner une forme de disponibilité intellectuelle, permettant de tirer de riches enseignements d’une trouvaille inopinée ou d’une erreur.

Nicola Clayton, psychologue britannique défend une « sérendipité enthousiaste ». « Nous sommes toujours responsables de notre propre chance. La sérendipité a un rôle à jouer, parce que nous ne pouvons pas planifier la chance, mais nous pouvons la favoriser en nous montrant ouverts et réceptifs aux idées »

Pour Étienne Klein, physicien et philosophe français, la sérendipité est réservée aux initiés, « La sérendipité fonctionne uniquement pour les esprits préparés, comme disait Pasteur. La chose survenue par hasard ne peut faire sens que pour celui qui cherche-quand bien même il cherchait ailleurs. »

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Poésie et liberté

Lionel Naccache, neurologue et chercheur en neurosciences cognitives, souhaite partager son admiration pour la science avec le plus grand nombre. « Il y a dans la science quelque chose de profondément humain, poétique, émouvant, une sorte d’émerveillement rationnel que tout le monde devrait pouvoir goûter ». Quoi de mieux que l’éducation pour la faire partager au plus grand nombre. Le dernier mot ira à Stéphane Douady, physicien et directeur de recherche au CNRS. « Ce qui me motive, peut-être le plus, c’est la volonté d’être libre. (…) Donc, un des moyens d’être libre est justement de bien connaître le réel, de savoir ce que je peux faire dans le réel, comprendre quelle est la contrainte, et une fois que je l’ai comprise, m’en libérer. ». Savoir, comprendre, se libérer. Tout est aussi là !

Savoir, penser, rêver

Savoir, penser, rêver, Les leçons de vie de 12 grands scientifiques, Ouvrage collectif, Flammarion, mai 2018, 288 pages, 19,90 €. Disponible sur le site de la Fnac.

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