Manifeste pour un coca bio, ou vouloir concilier alimentation et santé

Manifeste contre un coca bio

Qu’il est loin le temps de la sérénité au supermarché. Après la cascade de scandales sanitaires des années 2000, de répugnantes immersions au cœur de l’industrie alimentaire ou d’études soulignant le trop évident lien entre alimentation et maladies chroniques, les consommateurs ont décidé de dire stop. Ils disent désormais non aux conserves, aux ingrédients cachés et aux produits ultra-transformés. Leur nouvelle obsession ? Concilier alimentation et santé.

L’impossible revanche du steak haché

Souvenez-vous des multiples scandales liés à la viande de ces dernières années, remémorez-vous l’appréhension face à votre steak haché ou vos lasagnes surgelées. Aujourd’hui encore vous veillez au grain. Et les statistiques sont particulièrement significatives : les volumes de viandes achetés ont reculé de 3% ces dix dernières années, pendant que le flexitarisme explose.
Flexitarisme ? Oui, comme cet ami qui répète sans cesse « Je ne mange plus de viande à la maison. Sauf si j’ai des invités, et uniquement de la viande tracée de chez mon boucher ». Autrement dit, nulle volonté de dire adieu aux protéines animales, simplement en réduire sa consommation. Le porte-parole de Système U., Thierry Desouches, le concède « c’est la fin d’une société héritée des années 1970, quand le consommateur n’avait pas le souci de la qualité environnementale, du bien-être animal, des ingrédients problématiques… »

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Doit-on continuer à manger de la viande ?

À l’ère du végétal ?

Les Français semblent bel et bien délaisser la viande. Mais les géants de l’industrie alimentaire débordent d’idées et de moyens. Herta et Fleury Michon notamment proposent des alternatives sans viande pour vous faire oublier les éternelles Knacki. L’étude de juillet 2018 menée par l’institut Xerfi estime d’ailleurs que le segment de marché du traiteur végétal devrait bondir de 25% par an, pour atteindre 130 millions d’euros d’ici deux ans.
Danone n’est pas à la traîne non plus. Le groupe a dépensé plus que le PIB annuel de Madagascar afin de prendre le contrôle de l’américain WhiteWave, leader des produits laitiers bio, et de la marque Alpro, connue pour ses protéines végétales.


La course au manger-mieux

On incrimine beaucoup la viande, mais toute notre alimentation est concernée. Aviez-vous remarqué que vos courses à l’hypermarché sont de plus en plus longues ? Ce n’est pas à cause de l’affluence non, mais directement lié au temps passé à décrypter les étiquettes. Wanted ? Gluten, huile de palme, additifs, sucres ajoutés.

On souhaite manger mieux. Et ce n’est pas passé inaperçu chez Coca-Cola et PepsiCo, qui voient les ventes de leurs boissons fétiches s’écrouler à mesure que le sucre est diabolisé. Après la frénésie fin-de-siècle, les risques liés à la consommation de boissons sucrées ont explosé à la face des accros aux sodas. Coca-Cola et PepsiCo dans la tourmente ? Pas vraiment. Le premier détient près de 58% des parts de la marque de jus et de smoothies Innocent (vous n’en aviez sûrement pas conscience). Quant au second, il étend sans cesse sa gamme de jus de fruits et de soupes froides grâce à sa marque Tropicana. Vous l’aurez donc compris, la santé dans l’assiette est au cœur de nos préoccupations et de celles des géants.

Le bio, pour la santé ou pour la conscience ?

Que nous reste-t-il alors : nos yeux pour pleurer ? Ou notre porte-monnaie pour bien manger ? Soucieux de se maintenir en bonne santé, les consommateurs n’hésitent pas à se tourner vers les produits issus de l’agriculture biologique. Résultats ? Les achats alimentaires issus de l’agriculture biologique ont connu une augmentation de 17% en 2017, et l’année précédente Biocoop enregistrait une hausse de son chiffre d’affaires de 25%. Vous comprenez maintenant pourquoi le Carrefour du coin a multiplié la surface de son rayon bio ces dernières années. Et la raison pour laquelle Fleury Michon a annoncé un passage au bio d’ici 2025.
Car oui, près de 90% des Français ont acheté des produits alimentaires bio en 2016 et 69% se reconnaissent comme des consommateurs réguliers. De quoi donner du fil à retordre aux géants de l’agroalimentaire.

Tout ça car une écrasante majorité a aisément tendance à estimer que consommer bio, c’est prendre soin de sa santé. En effet, les études se multiplient pour signaler les bienfaits de l’agriculture biologique. Moins de résidus, de pesticides, de métaux toxiques… A contrario, d’autres chercheurs clament haut et fort que les avantages nutritionnels ou sanitaires du bio sur l’agriculture conventionnelle sont infimes voire… inexistants ! Retenons quand même que l’agriculture conventionnelle utilise 389 substances actives dont 340 avec un degré de toxicité. Contre 35 substances actives dans l’agriculture biologique et 4 ayant un degré de toxicité. Mais quand même, qui croire ? Et comment dénicher le vrai du faux ?

Force est néanmoins de constater que les grands groupes prennent le train du bio en marche et plaident à présent, comme le souligne Gérard Mulliez (le fondateur du groupe Auchan), pour une « démarche militante », prônant « du bon, mais aussi du sain et du local ». La santé passe par l’assiette : tout est dit.

Aime ton voisin

Les acheteurs et leurs consciences plébiscitent les circuits courts. La solution la plus simple, la plus archaïque peut-être. Thierry Desouches (le porte-parole de Système U) rendrait presque poétique ce positionnement nouveau du groupe. En effet, « il faut ramener de l’authenticité, de la proximité, du terroir ». Et nombreuses sont les enseignes qui ornent leurs têtes de gondole de produits de la région ou qui n’hésitent pas à estampiller leurs fruits et légumes d’une mention « de saison et de région ». Une enquête menée par l’INRA a d’ailleurs révélé que 42% de leurs sondés avaient acheté un produit en circuit court lors du dernier mois. Les raisons ? Un impact écologique inférieur, une production moins déshumanisée, des produits plus frais. Et les AMAP (associations qui établissent un lien direct entre un exploitant agricole de proximité et des consommateurs) ont le vent en poupe : de 3 au début des années 2000, on en dénombre aujourd’hui plus de 2 000.

La révolution est bel et bien en marche. Mais le véritable pas en avant, le réel progrès, semble avant tout résider dans la prise de position du consommateur. Le mieux-manger ne pourrait-il pas se jouer ailleurs qu’en hypermarché ? La déferlante de la santé dans l’assiette a de beaux jours devant elle. Parce que finalement, manger mieux est clairement devenu tendance.

Tout savoir sur les AMAP :

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Sources

Mouvement inter-régional des AMAP,
– INRA, « Les circuits courts rapprochent les producteurs des consommateurs »,
France AgriMer,
Agence Française pour le Développement et la Promotion de l’Agriculture Biologique,
Le Monde,
– Crystal Smith-Spangler et al., « Are Organic Foods Safer or Healthier Than Conventional Alternatives?: A Systematic Review », Ann Intern Med., 2012, 157(5), p. 348-366.