Moins de vitamine C dans les pommes d'aujourd'hui ?

100 fois moins de vitamine C dans nos pommes que dans celles de 1950 ! Mensonge ou vérité ?

La rumeur est tenace depuis des années : nos fruits et légumes seraient de moins en moins riches en nutriments ! Et cette rumeur enfle avec notamment la reprise de l’information par les médias mais aussi par des personnages politiques. Ainsi, dans un documentaire, on apprend que « au cours des cinquante dernières années les aliments ont perdu jusqu’à 75 % de leur valeur nutritive… et il faut cent pommes actuelles pour le même apport de vitamine C qu’une seule pomme ancienne et vingt oranges au lieu d’une pour l’apport de vitamine A ».
Alors, mensonge pour dénigrer l’agriculture moderne ou vérité inavouée ?

Deux sources aux origines de la rumeur

Cette déclaration repose sur deux articles : l’un publié en 2003 comparant la densité en nutriments de 27 légumes et 17 fruits de 1940 à 1991 et un second, publié en 2009 par Donald R. Davis de l’université du Texas. A la lecture des ces deux études, les interrogations se multiplient quant à la rigueur scientifique. La méthodologie d’analyse utilisée en 1950 est-elle la même que celle de nos jours ? Les conditions de culture sont-elles similaires ? Les variétés analysées sont-elles identiques ? Et oui, il est nécessaire de répondre à toutes ces questions pour répondre à la grande question qui nous intéresse.

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La variété : un des biais de cette comparaison ?

L’affirmation selon laquelle il y aurait cent fois moins de vitamine C dans les pommes d’aujourd’hui est basée sur une comparaison entre la pomme Transparente de Croncels (variété de 1950) et la pomme Golden (variété de nos jours). Or ce n’est pas nouveau : la composition nutritionnelle est très hétérogène pour un même fruit (ou légume), en fonction de la variété que l’on sélectionne ! La pomme Golden n’a jamais été réputée pour être la plus riche en vitamine C. L’affirmation est donc biaisée par le fait que deux variétés différentes ont été comparées !

Ne jamais négliger les sources !

A défaut d’avoir des échantillons à analyser datant de plus d’un demi-siècle, les scientifiques ont utilisé la méthode de comparaison des données des tables de composition des aliments : celle de 1947 et celle de 2016. Or, il faut relativiser : les données de 1947 ne sont pas aussi précises que les données actuelles ! Pour pouvoir comparer au mieux ces deux tables de composition, il faut prendre en compte l’évolution des méthodes d’analyses, mais aussi ne se référer qu’à des nutriments dont le dosage était possible, facile et fiable pour 1947 ! C’est plus difficile qu’il n’y parait.


La maturation : l’autre élément clef d’une comparaison biaisée ?

Nous l’avons vu, la densité nutritionnelle varie en fonction des variétés. Mais il faut savoir qu’elle varie aussi tout au long de la vie d’un fruit ou d’un légume ! Pour les agrumes par exemple, la teneur en vitamine C est deux fois plus importante dans les fruits immatures que dans les fruits matures. Les analyses ont-elles été effectuées au même stade de maturation ? Difficile à croire !

À la recherche de fruits et légumes riches en nutriments

De manière générale, nous pouvons affirmer que : oui, nos aliments contiennent moins de nutriments. Mais cela n’est pas aussi alarmant que ce que l’affirmation relayée dans les médias prétend. Cela peut s’expliquer par la sélection de certaines variétés moins riches nutritionnellement au détriment d’autres, à cause de critères esthétiques notamment. Ou par le fait que les fruits et légumes sont récoltés avant maturité pour pouvoir mieux résister aux centaines voire aux milliers de kilomètres qu’ils parcourent avant d’être vendus.

Trois solutions pour consommer des fruits et des légumes au meilleur de leurs apports nutritionnels

1 – Recourir aux circuits courts grâce notamment aux AMAP ou en privilégiant les produits locaux.

2
– Privilégier les produits issus de culture en plein champs plutôt que ceux issus de culture hydroponique ! La culture hydro- quoi ? C’est une culture hors-sol où la terre est remplacée par un substrat inerte et stérile auquel le cultivateur vient ajouter des solutions nutritives nécessaires à la croissance des produits. De plus, les produits ne voient pas forcément la lumière naturelle et sont cultivés dans des conditions climatiques recréées artificiellement. L’inconvénient de ce mode de culture, c’est que les produits ont des qualités gustatives, aromatiques et nutritionnelles homogènes. Un produit qui provient vraiment de la terre, c’est bien meilleur non ?

3
– Respecter la saisonnalité. Un produit de saison est un aliment que l’on consomme quand il arrive à pleine maturité, NA-TU-RELLEMENT ! Exit les serres chauffées, adieux les produits qui ne respectent pas leur cycle naturel de croissance ! Des calendriers de saisonnalité sont disponibles pour vous aider à vous recaler sur les cycles naturels des produits. Et oui, cela concerne aussi les poissons, les coquillages, les céréales, les fromages…

Sources

– Guégen L., directeur de recherches honoraire de l’INRA, « La valeur nutritionnelle des aliments a-t-elle diminué depuis 60 ans? »
– Davis D. R., « Declining fruit and vegetable nutrient composition: what is the evidence? », Hortscience, n°44, 2009, 15-19.
– Randoin L., Le Gallic P., Causeret J., Tables de composition des aliments (2ème édition), 1947.
– Ciqual-Anses, Composition nutritionnelle des aliments : Table Ciqual, 2016.
Agrapresse, « Densité nutritionnelle des fruits et légumes : une équation complexe », 2015.

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