Kangouroo Girl : son quotidien avec le syndrome du grêle court

LQDP s’est rendu sous le soleil de La Ciotat afin de rencontrer la lumineuse Charlène, aussi connue sous le pseudonyme Kangouroo Girl.

Charlène, peux-tu nous en dire davantage sur toi et ton histoire ?

Je suis Parisienne, à l’âge de 13 ans j’ai déménagé dans le Sud de la France, à La Ciotat. J’ai toujours été, aussi loin que je me souvienne, une petite fille anxieuse qui avait souvent mal au ventre. J’avais des douleurs abdominales importantes, du sang et des glaires dans les selles (des selles multiples, de jour comme de nuit). J’étais amaigrie, fatiguée, et de plus en plus anémiée…

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J’ai été diagnostiquée d’une rectocolite hémorragique dite RCH (Maladie Inflammatoire Chronique de l’Intestin) à l’âge de 13 ans. J’étais en troisième, au collège.

Face à un échec de tous les traitements (pentasa, corticoïdes, immunosuppresseurs, anti TNF-ALPHA) reçus, j’ai dû recourir à la chirurgie à mes 18 ans car mon côlon était trop abîmé par la maladie. Cette dernière se passe très mal… Le chirurgien coupe la mauvaise artère (artère mésentérique, celle qui irrigue l’intestin grêle), et me plonge dans un coma artificiel pendant 10 jours afin de pouvoir sauver le maximum de grêle (et me fait une greffe de la veine saphène à la cuisse pour l’utiliser).


À mon réveil, il ne me restera que 30 cm d’intestin (sans côlon et sans appendice) ainsi qu’une iléostomie définitive (avec perfusion 24h sur 24 , puis 15h sur 24 la nuit afin d’être hydratée et nourrie). Plusieurs mois après, on me retirera également le rectum (atteint par la RCH) et la vésicule biliaire (suite à des calculs liés la nutrition parentérale)

« Aujourd’hui j’ai 25 ans, j’ai décidé d’aimer la vie et de m’accorder le bonheur malgré tout ce que j’ai traversé ».

Après avoir été plongée en coma artificiel et après les soins intensifs, qu’as-tu ressenti moralement et physiquement ? Etais-tu en colère après cette erreur médicale ? Quel regard portais-tu sur ton propre corps ?

À mon réveil, j’étais dans une autre dimension. Moralement, je ne réalisais rien, je ne comprenais rien. Je savais juste que cela ne s’était pas « passé comme prévu » (parole du chirurgien dont je me souviens vaguement malgré la morphine que l’on m’administrait constamment afin que je ne souffre pas).

Physiquement je souffrais malgré toutes les drogues que l’on m’administrait. J’avais la sensation d’avoir une plaque en métal hyper lourde sur tout le ventre, qui m’empêchait de bien respirer. Je ne savais plus déglutir, respirer sans les machines… j’ai dû réapprendre à tout faire.

Je me sentais faible, sans pouvoir bouger mes membres. C’était effrayant ! Je venais de faire 19 ans et après un coma je ne savais plus rien faire ! 

© Wanderlust Photography pour kangouroo_girl

Et aujourd’hui, comment te sens-tu ? 

Aujourd’hui, après de nombreuses années de souffrances, j’ai compris que ressasser la haine et la colère ne m’apportait que tristesse et mal-être. Alors j’ai travaillé sur moi-même, longtemps, pour retrouver un certain équilibre, autant moral que physique.

Aujourd’hui, je me sens en paix face à tout ça. J’ai décidé d’avancer, voir le positif, celui d’être en vie malgré tout ce que j’ai traversé.

Peux-tu nous parler de ton quotidien, qui a sans nul doute été chamboulé ?

Mon quotidien tout entier a été chamboulé ! Mes habitudes alimentaires notamment ! Je suis devenue hyperphage, je mange 10 000 calories par jour en moyenne parce que je n’absorbe rien de ce que je mange ou de ce que je bois.

Je suis perfusée 15h sur 24. Ce qui me laisse peu de liberté mais, paradoxalement, je me sens si libre et si chanceuse d’être en vie ! 

Je ne peux et ne pourrai malheureusement jamais travailler. Mais j’ai plein d’autres projets.

T’engages-tu aujourd’hui pour faire connaître voire reconnaître le syndrome du grêle court ? As-tu envisagé de créer une association de patients ?

Aujourd’hui, j’ai décidé de m’engager corps et âme dans la sensibilisation du syndrome du grêle court, afin que le tabou sur les MICI soit levé et que les conséquences de ces maladies soient connues. Le simple fait d’en parler est déjà tellement libérateur ! J’ai pensé à une éventuelle association, mais pour le moment j’ai d’autres projets qui me tiennent à coeur. Comme celui d’être présente pour les malades ainsi que celui de publier un livre.

Un dernier petit mot pour toutes les personnes vivant au quotidien avec le syndrome du grêle court ?

J’aimerais dire à toutes les personnes souffrant du SGC qu’il faut jamais baisser les bras parce que la médecine et les avancées ne cessent d’évoluer. Personnellement, j’ai envie de croire à une solution sur du long terme, l’imprimante 3D serait un si bel avenir pour toutes personnes en souffrance du SGC. Ne baissons pas les bras ! Levons-les et continuons à y croire ! Combattons le tabou !

 

© Wanderlust Photography pour kangouroo_girl

Un très grand merci à Charlène pour son accueil, sa disponibilité et son sourire. Vous pouvez la retrouver sur Facebook et Instagram.

Photo de couverture : © Wanderlust Photography pour kangouroo_girl